mardi 30 juin 2009

Le premier arbre


Ce soir, j'ai esquissé l'arbre de ma cour. J'aimerais apprendre à peindre les arbres... Hier soir j'ai visionné un superbe documentaire sur le peintre Suzor-Côté. Je pense qu'il est devenu mon peintre préféré!!!!!! Il a passé sa vie à peindre des femmes nues et des paysages. Qu'espérer de plus de la vie? Cet après-midi j'ai commencé à lire le Journal du peintre de Nicolet, Rodolphe Duguay (1891-1973). C'est passionnant! Je n'en suis qu'à la page 88, le livre en compte 750! Mais je prendrai mon temps, je veux découvrir ce peintre dont j'ai déjà visité l'atelier il y a quelques années. Duguay a été l'élève de Suzor-Côté. À la page 78 du Journal, Duguay note les conseils de son maître: "C'est l'Air qu'il faut peindre", "Les verts des arbres et de l'herbe ne doivent pas être les mêmes, observez les verts" et ce conseil d'une grande poésie: "Ne pas faire de fenêtres dans vos arbres"!

Je vous offre le petit croquis de ce soir; c'est un peu comme mon premier arbre. Il y a si longtemps que je n'avais pas pris le temps de dessiner.

lundi 29 juin 2009

Paysage


Depuis quelques années la poésie Suisse romande me passionne. J'admire l'oeuvre de Philippe Jaccottet, Gustave Roud et Anne Perrier. Mais j'ai aussi une affection particulière pour Jean-Georges Lossier (1911-2004) et sa poésie à la fois intime et cosmique.

"PAYSAGE

Là commence une plaine infinie
Et plus loin encore l'histoire s'arrête,
Le ciel repose lourdement sur le lac
Au fond de la chambre le bonheur moud son grain.

Butant contre les parois de pierre
L'air incendie la cour de l'été,
Il nous est donné de ne plus souffrir,
Tout se tait dans la douce laine des jours."

dimanche 28 juin 2009

Il existe pourtant


Je feuilletais, tout à l'heure, un magnifique catalogue d"oeuvres de Paul Cézanne. J'ai repensé avec émotion à ce beau poème de Marie Uguay qui commence par Il existe pourtant...

"Il existe pourtant des pommes et des oranges
Cézanne tenant d'une seule main
toute l'amplitude féconde de la terre
la belle vigueur des fruits
Je ne connais pas tous les fruits par coeur
ni la chaleur bienfaisante des fruits sur un drap blanc
(...)

et se termine ainsi

Doucement Cézanne se réclame de la souffrance du sol
de sa construction
et tout l'été dynamique s'en vient m'éveiller
s'en vient doucement éperdument me léguer ses fruits"

samedi 27 juin 2009

Poètes à venir


Walt Whitman (1819-1892) est probablement le poète américain le plus célèbre. Il fait figure de père de la nation. Sa photo se retrouve dans les écoles et les enfants lisent sa poésie. Il a consacré sa vie à écrire Feuilles d'herbe, son seul recueil qu'il modifiera jusqu'à la fin de ses jours. Relire sa poésie me fait toujours du bien. Voici un très beau texte de Whitman où il salue les poètes de demain.

"Poètes à venir! Tribuns, chanteurs, musiciens à venir!
Je ne demande pas au Présent ma raison d'être.
Le Présent ignore pourquoi je suis.
Mais vous, nouvelle couvée, couvée insulaire, athlétique, cosmopolite, plus grande que toutes,
Levez-vous! Avancez et grandissez!
Je n'écris que deux ou trois mots indicateurs de l'avenir;
Je suis celui qui n'accomplit que quelques pas et se retire dans ses ténèbres originelles;
Je suis l'homme qui va sur la route, sans fléchir, jette un regard léger vers vous, et vous retire son visage,
Vous laissant la tâche de prouver, de définir,
Espérant de vous les mots essentiels."

vendredi 26 juin 2009

Les fenêtres du ciel


Dominique Zalitis, poète québécoise d'origine Lettone, m'a envoyé un mot très gentil que je voudrais partager. C'est peut-être ce qu'on m'a dit de plus beau au sujet de mon dernier recueil:

"Te lire te relire
c'est pour moi, revoir le monde pour la première fois

La simplicité des choses
à travers les fenêtres du ciel
voir où naissent
les vents qui attisent les braises
et les promesses de l'enfance

La douceur et la sensibilité de tes mots
est un refuge
que l'on voudrait être les seuls à connaître
pour pouvoir s'isoler du reste du monde"


jeudi 25 juin 2009

La fleur de l'enfant


Le matin, lorsque le soleil est encore tout jeune, j'aime bien lire Henry David Thoreau (1817-1862)! Son Journal, considéré comme l'un des plus beaux textes de la littérature américaine, m'est toujours une source de joie. Voici un extrait (relu au hasard ce matin) que j'avais souligné en 2003 dans mon exemplaire, très précieux, de son Journal:

"Je crains bien que l'enfant qui cueille une fleur pour la première fois n'ait une intuition de sa beauté et de sa signification que le botaniste ensuite ne gardera pas."

mercredi 24 juin 2009

Ode au Saint-Laurent


En cette journée de la Saint-Jean, quelques lignes du fameux poème de Gatien Lapointe:

Ode au Saint-Laurent

"Ma langue est d'Amérique
Je suis né de ce paysage
J'ai pris souffle dans le limon du fleuve
Je suis la terre et je suis la parole
Le soleil se lève à la plante de mes pieds
Le soleil s'endort sous ma tête
Mes bras sont deux océans le long de mon corps
Le monde entier vient frapper à mes flancs"

mardi 23 juin 2009

10 ans déjà... Perrault


Pierre Perrault est mort il y a dix ans, le 24 juin 1999. Pour souligner l'événement, je propose un extrait de son poème le plus célèbre. Un texte écrit en hommage à Marie Tremblay de l'ile aux Coudres, lumineux "personnage" de ses films Pour la suite du monde et Le règne du jour.

"LA CHANSON DE MARIE

la pomme rouge et la gelée blanche
puisqu'on parle de la vie
tourmentent le même jour
le pommier doux

dis marie
mon grand pays
au bout de ce grand bout de neige
dis ce que tu penses de la terre

de la terre qui reprendra nos visages
pour en faire des feuillages
aux branches du coudrier"

lundi 22 juin 2009

Eeva-Liisa Manner


J'aime beaucoup la petite collection Orphée des Éditions La Différence. Des recueils en format poche qui nous font découvrir des poètes de partout à travers le monde. Il y a quelques temps, par hasard, j'ai acheté Le Rêve, l'ombre et la vision de Eeva-Liisa Manner. Il s'agit de la poète nationale de Finlande. Voici un extrait d'un poème très émouvant intitulé Reflets:

"Le cheval s'avance sur le ponton et se penche sur l'eau,
du profond de l'eau s'élève un autre cheval à sa rencontre.

Le cheval boit et secoue de son harnais
une musique aléatoire dans le doux soir.

Le cheval nage et passe un gué profond,
créature couleur terre, chair, nerfs et liesse,

alentour le soleil et son or déversé."

dimanche 21 juin 2009

Lire sur la galerie


J'ai passé l'après-midi à lire sur la galerie. Le vent écrivait ses poèmes dans les arbres et de belles femmes marchaient dans la rue. Tout pour être heureux: une limonade et un livre dans les mains. Risquer la liberté, essai de Fabrice Midal, philosophe et auteur de plusieurs ouvrages sur la spiritualité. J'ai emprunté ce livre très récent à la bibliothèque pour son chapitre sur Rilke. Voici un extrait:

"Rainer Maria Rilke commence à écrire de la poésie selon les usages en vigueur. Avec talent. Mais, peu à peu, il se rend compte qu'être poète, ce n'est pas cela. La poésie empêche la poésie. Elle n'est le plus souvent que jongleries relatives et contorsions contingentes, une sorte de divertissement savant pour quelques privilégiés. Elle est jeu littéraire et non engagement de la vie tout entière. Rainer Maria Rilke veut en libérer les ressources qui ne s'adressent nullement à quelques lettrés, mais qui concernent chacun de nous, quelle que soit l'éducation qu'il ait reçue - éducation qui n'est, en ce domaine, que d'un faible secours, voire qui constitue un handicap. La poésie n'est pas un exercice de spécialiste, mais le rapport le plus libre au réel."

samedi 20 juin 2009

Dix mille vies


J'ai emprunté, à la bibliothèque Gabrielle-Roy, Dix mille vies du poète coréen Ko Un. Dans un avant-propos le poète, né en 1933, écrit:

"La poésie, sans quoi elle ne mériterait pas son nom, vient d'un temps d'avant la poésie. Le langage n'appartient à personne en particulier. Les mots qui, par hasard, ont été appelés dans un poème, à l'origine étaient le dialecte de l'univers.

Il y a très longtemps, la poésie est née ici ou là sur la planète Terre. Elle contenait la longue histoire des autres planètes. La poésie existait ainsi avant le poète."

vendredi 19 juin 2009

Une poète d'Iran


J'ai fait une belle découverte sur Internet. Granaz Moussavi est une poète Iranienne, née en 1973 à Téhéran, qui publie ses recueils à ses frais et sous forme de samizdat (diffusion clandestine des ouvrages interdits par la censure). Le peuple iranien est un grand peuple et les prochains jours s'avèrent importants pour la liberté de parole dans ce pays.

"FAUTE

Alors qu'un peu plus loin
Le monde se résume
À la pomme qu'Ève offre à Adam

Ici
Commettre une faute
C'est trouver le calme dans tes bras
Et dire que je suis fatiguée
D'entendre
La hache,
La hache abattre la forêt"

jeudi 18 juin 2009

le soleil levant de l'invisible


Christian Bobin, dans un superbe essai sur Émily Dickinson intitulé La dame blanche, écrit:

"Bien avant d'être une manière d'écrire, la poésie est une façon d'orienter sa vie, de la tourner vers le soleil levant de l'invisible".

mercredi 17 juin 2009

Rainer et Lou


Je suis en train de lire la correspondance de Rainer Maria Rilke et de Lou Andreas-Salomé. C'est l'histoire d'un lien assez unique; du coup de foudre jusqu'à l'amitié et la complicité artistique. Vraiment touchante cette rencontre entre un jeune poète de 21 ans et une intellectuelle et femme libre de 36 ans.

Jamais, dans mes timides tâtonnements, je n'avais autant senti l'être, autant cru à la présence et autant admis l'avenir; tu étais l'antithèse de tous les doutes et pour moi une preuve que tout ce que tu touches, atteins et regarde existe. Le monde perdit pour moi son caractère nébuleux, cette façon flottante de se former et de se décomposer qui fut la manière et la pauvreté de mes premiers vers (...) j'appris une simplicité, j'appris avec lenteur et difficulté que tout est simple, et j'acquis la maturité pour parler des choses simples" (extrait de la correspondance).

mardi 16 juin 2009

La belle Émily


Je viens de passer un mois avec Émily Dickinson (1830-1886). J'avais le sentiment d'habiter sa petite chambre d'Amherst en Nouvelle-Angleterre et de lire ses poèmes par dessus son épaule. J'ai lu avec passion tout ce que j'ai pu trouver à son sujet: poèmes, essais, dossier sur Internet.

À l'heure où de nombreux poètes se jettent sous le premier projecteur venu, comme il est bon de lire une poète qui ne faisait pas carrière et n'a pas croulé, de son vivant, sous les prix et les honneurs.

Qu'un puits recèle de mystère!
L'eau habite si loin -
Voisine venue d'un autre univers
Logée dans une jarre

Dont nul n'a jamais vu les bords,
Sinon ce couvercle de verre -
Par où contempler à loisir
La face d'un abîme!

L'herbe ne paraît pas intimidée
Et souvent je m'étonne
Qu'elle fixe, si proche et si hardie,
Ce qui fait mon effroi.

Un lien l'unit à l'eau peut-être,
Les joncs jouxtent la mer
Là où cesse la rive
Et ne trahissent nulle crainte -

Mais la nature reste une étrangère;
Ceux qui en parlent le plus
N'ont jamais passé sa maison hantée
Ni élucidé son spectre.

On plaint moins qui l'ignore
Si l'on songe à regret
Qu'on la connaît d'autant moins
Qu'on l'a le plus approchée.

lundi 15 juin 2009

Un mot de Marie-Claire Blais


Je viens de recevoir une belle carte de Marie-Claire Blais. Elle m'écrit:

J'espère que ce mot vous retrouvera pour vous remercier de ce beau livre La lenteur du monde, de vos poèmes d'où monte une chaude lumière. Parfois c'est si ingénu et si frais comme ces quelques mots très simples: "l'amour était un petit fruit qui remplissait ma bouche, et de son regard, le monde retrouvait le chemin."

Je souhaite vivement vous remercier pour ce beau livre qui nous guide vers une contemplation toute quotidienne et sobre de notre univers, des beautés précaires mais si puissantes parmi lesquelles nous vivons.

On comprendra que je suis très ému et que ma journée sera pleine d'un soleil reconnaissant.