lundi 23 mars 2009

Un vendredi avec Catherine Fortin


À l'atelier de vendredi dernier, nous avons eu de la belle visite: la poète Catherine Fortin de St-Jean-Port-Joli. Quelle magnifique rencontre! Catherine, qui se définit elle-même comme poète autodidacte, est une archéologue-biologiste très sensible aux réalités souterraines. Comme son père, cultivateur et habitant qui aimait sa terre, Catherine Fortin habite le paysage, tout le paysage, même celui que l'on ne voit plus. La géographie la façonne. Parlant de ces moments où elle regarde la mer ou les étoiles elle dit: devant cette immensité nous reprenons notre juste place

Et puis cet aveu très touchant (qui n'est pas une simple métaphore mais correspond à sa réalité): j'ai appris à parler quand j'ai appris à lire. C'est que la jeune Catherine était d'une timidité extraordinaire. Sa poésie témoigne de cette prise de parole, de ce regard attentif posé sur le monde.

Voici un extrait d'un poème intitulé Quand brûlaient nos yeux, tiré du recueil Le silence est une voie navigable, publié aux Éditions du Noroît en 2007:

Sommes-nous en voyage
ou simplement devant une fenêtre?

Parfois nous croyons avancer
sans laisser de traces
alors que nous parcourons
avec la gravité des orphelins
la reddition   l'attente

mercredi 18 mars 2009

Pourtant, le soleil est là


Voici un extrait d'un poème très émouvant. Il a été écrit par Arlette Humbert-Laroche, une jeune déportée, morte à l'âge de vingt-six ans à Bergen-Belsen en 1943. Le poème s'intitule On tue et débute ainsi: On tue/ d'un bout de la terre à l'autre/ On tue et un peu plus loin elle écrit: la terre est soudain devenue/ une éponge monstrueuse/ buvant la longue patience des hommes. Le poème se termine, malgré toute l'horreur de la situation,  sur une célébration du monde:

Pourtant, le soleil est là.
Je l'ai vu ce matin
Jeune, fort exigeant.
Il ruisselait sur les toits
Il mordait au coeur les arbres,
Et réclamait de la terre son réveil,
Il est là,
Il est au fond de toutes choses.

lundi 16 mars 2009

La voix de Joanne Morency


Je viens de relire Miettes de moi de Joanne Morency, un magnifique recueil publié aux Éditions Triptyque. Il y a une telle cohérence dans ce livre, une unité créée par la sonorité, le choix des mots, la façon de parler. On appelle cela: avoir une voix. Et c'est tellement remarquable dans ce livre, la présence de cette voix. 

On assiste à une sorte d'inventaire de tout ce qui nous entoure. Un peu comme si nous prenions conscience, pour la première fois, du paysage. Et c'est une femme debout, face à l'avenir, que l'on retrouve à la fin de Miettes de moi. Une femme, plus tout à fait seule: Devant moi, un nouveau paysage, troublant de tendresse.

Voici un livre porté, du début à la fin, par un regard. Un regard posé, avec respect et délicatesse, sur les choses de la vie. Un regard, non pas fabriqué par la littérature, (Joanne Morency ne cherche pas à en mettre plein la vue ou épater la galerie!) mais un regard vécu et sensible. Il y a beaucoup de vie dans ce recueil.

samedi 14 mars 2009

Poème pour Christian


Voici le premier poème de mon premier recueil, publié en 1992 aux Écrits des Forges. Je l'offre à mon neveu Christian qui a reçu aujourd'hui sa bague d'ingénieur. Je suis très fier de lui! Il me parlait, tout à l'heure, de l'arbre que je regardais de ma fenêtre lorsque j'écrivais mes premiers textes. C'est de cet arbre dont il est question ici:

je trace des mots
pour plus loin que moi

le poème est un arbre étrange

nous tournons des pages
comme d'autres trouvent le temps long
disent bonsoir aux oiseaux

lundi 9 mars 2009

Douze hommes rapaillés


Depuis quelques jours,  j'écoute continuellement le bel album Douze hommes rapaillés, le disque hommage au poète Gaston Miron. C'est d'une grande beauté et absolument surprenant. J'adore les chansons de Daniel Lavoie, Louis-Jean Cormier et Richard Séguin. Et ce vers de Miron que je ne cesse de fredonner: Souvenirs, souvenirs, maison lente...

samedi 7 mars 2009

La lumière du haïku


Hélène Leclerc, poète de Drummondville, a dirigé un impressionnant dossier sur le haïku au Québec dans la revue française 575. On y retrouve un dossier sur l'année québécoise en haïku, sur l'histoire du haïku au Québec, entrevues, articles, photographies et même une bande dessinée de Jessica Tremblay! Un magnifique numéro! J'y présente un petit texte de réflexion intitulé "La lumière du haïku" et que vous pouvez lire en cliquant sur le lien suivant:


Je signale également la publication, dans les prochains jours, du deuxième recueil de haïku d'Hélène Leclerc. Il s'intitule Cette lumière qui flotte et est publié aux Éditions David. J'ai hâte de le lire, moi qui avait tellement aimé son précédent recueil Lueurs de l'aube.

jeudi 5 mars 2009

Philippe Jaccottet dans la Pléiade!


Quelle joie! Je viens tout juste d'apprendre que Philippe Jaccottet (mon poète préféré) a signé un contrat avec Gallimard. Un volume de la Pléiade, une édition presque complète des oeuvres de Jaccottet sont à présent inscrits dans le programme de Gallimard. Publication du volume au début de 2011.

Comme je suis heureux!

mardi 3 mars 2009

Deux petits haïkus


Voici deux haïkus de poètes japonaises lus dans l'anthologie Du rouge aux lèvres publié aux Éditions La Table Ronde.

"Béchant la rizière,
un homme
retourne son ombre"

(Midorijo Abé, 1889-1980)

"Des branches dépouillées
cherchent dans le ciel
quelque chose à toucher"

(Nobuko Katsura, 1914-2004)

dimanche 1 mars 2009

Comment j'écris mes poèmes

















Voici un poème écrit vendredi dernier en atelier. L'exercice est inspiré du titre d'un texte de Pierre Morency. Un poète que j'aime beaucoup. 


Comment j'écris mes poèmes

il y a de ces nuits
où j'arrive à m'asseoir en moi

en dedans c'est confortable vous savez
quand on est si près des songes
et que plus personne enfin ne parle
ne sait plus parler
ignore tout de la vie et de ses gares

c'est que tout le temps tout le monde
veut partir ne plus être là
ne plus être assis dans ses souvenirs

et pourtant comme il est bon
pour qui fait métier de se taire
d'être là où il est
d'avancer par en dedans
de devenir lampadaire ou oiseau

il est si bon de ne pas partir
de plonger dans son ombre
et de descendre du train de ses yeux

c'est alors que rêvant au devant de soi
on allonge la parole vers l'autre

(27 février 2009)